Le cireur de chaussures

La journée d'un......Cireur de chaussures

Personnage phare qui anime les rues du Caire. Premier sujet des photos arrachées par les touristes. Le warnich, cireur de chaussures égyptien, essaie chaque jour de gagner un maximum de clients pour rentrer à la maison, le sac garni de provisions. Le Petit Journal a suivi l’un d’entre eux dans son travail quotidien

Sur le même trottoir depuis 40 ans, Abdel Radhi redonne vie aux chaussures des Cairotes. Photos : Sara Haba

"C’est le meilleur cireur de chaussures de Tahrir, le plus connu", lance un client. Lui, c’est Abdel Radhi, surnommé Abdou. Vêtu d’une galabiya grise et d’un petit bonnet d'où émergent ses cheveux gris, il prend place dès 9h sur le même trottoir qu’il occupe depuis 40 ans. Assis à l’ombre sur une pierre faisant office de tabouret de poupée, Abdel Radhi raconte ses débuts : "A 10 ans, j’ai commencé à travailler chez un cordonnier. J’y ai appris le métier. A 18 ans, j’ai décidé de travailler seul et j’ai fini par aimer ce métier au point de n’envisager aucun autre moyen de gagner de l’argent".
2m² suffisent à Abdou pour travailler et pour s’installer toute une journée. Juste de quoi poser sur le sol son corps recroquevillé, ses boites de cirage et sa petite caisse en bois. Une caisse qui le "suit depuis 40 ans". Une caisse qui contient boites de cirage, brosses, et souvenirs depuis son plus jeune âge. "Cette boite ne me quitte jamais", confie Abdou en souriant, laissant apparaitre les quelques dents qui lui restent.

"Le travail d’Abdou doit toujours être bien fait"
9h15 : la chaussure du premier client atterrit sur le repose-pied d’Abdel Radhi. C’est alors toute une chorégraphie qui se met en place. Abdou dépoussière la chaussure. Abdou la cire. Abdou la fait briller. Des gestes enjolivés par un jeu de main, qu’il connaît désormais par cœur. Le chiffon de velours virevolte sur le cuir et la brosse lui passe d’une main à l’autre tel un jongleur.
Des simples sandales aux derniers mocassins Armani, toutes les chaussures lui passent sous la main et n’ont plus aucun secret pour lui. "J’apporte une seconde vie aux chaussures. Elles sont un trésor pour les Cairotes. Comme les femmes se maquillent ou se parent de bijoux avant de sortir, les hommes enfilent ici leurs plus belles chaussures", explique Abdel Radhi, en sirotant son thé.
Une pause thé qui sera vite écourtée par des clients plus ou moins empressés. Mais, Abdou aime prendre son temps. Selon l’état de la chaussure, la mission lui prendra de 2 à 7 minutes. "Le travail d’Abdou doit toujours être bien fait", se flatte-t-il. "Chaque client me donne entre 50 centimes et 1 livre. Je gagne environ 25 livres par jour. Ca ne suffit pas, mais el hamdoulilah, je mange de la tahmiya et des foul", plaisante-t-il.
Accroupi, sa galabiya tachée par le cirage, Abdou traverse les années sans râler. "Je suis fatigué mais je continue de travailler. J’ai neufs enfants que je dois nourrir, éduquer et marier", avoue Abdel Radhi. "En Egypte, il n’y a pas un métier plus fatiguant qu’un autre. Moi, j’aime ce qui me fait vivre, ça me va", conclut-il.
Sara HABA. (www.lepetitjournal.com - Le Caire - Alexandrie)