Une barque funéraire datée de l’époque thinite (Ire et IIe dynasties) a été mise au jour la semaine dernière à Abou-Rawach par l’équipe archéologique de l’IFAO.

 

La plus ancienne barque au monde

 

Non loin du Caire, à quelque huit kilomètres à l’ouest, s’étend le site archéologique d’Abou-Rawach. Là opère une mission française, dépendant de l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO), depuis plusieurs années. Dernièrement, les travaux de fouilles ont révélé les vestiges d’une barque au cimetière thinite au nord du mastaba numéro 6. Cette barque date du règne du roi Den (aux environs de 2939-2892 avant notre ère), Ve roi de la première dynastie. Il s’agit de la trouvaille de 11 planches fines de bois local dont les mesures sont 6 x 1,50 m. Selon les archéologues, les débris de cette embarcation sont en bon état et semblent être intacts depuis cet âge lointain grâce à l’environnement sec du site qui avait préservé ces planches découvertes.

Selon les archéologues, cette découverte est la première en son genre, puisque c’est la première fois qu’ils trouvent les débris d’un bateau qui date de l’époque thinite et, en plus, la fosse dans laquelle il était enterré. « Ceci est une preuve de l’importance de ces embarcations pour les Egyptiens depuis l’aube de la civilisation égyptienne », commente Kamal Wahid, directeur des antiquités égyptiennes à Saqqara et Dahchour. Selon lui, les bateaux étaient dessinés en abondance sur les parois des grottes préhistoriques et les murs des tombes, mais jamais un indice concret n’a été trouvé quant à l’existence de ces barques avant la IVe dynastie. La barque en question est considérée pour le moment comme la plus ancienne du monde entier jamais trouvée, redoublant en fait l’importance de cette découverte.

Les égyptologues supposent que ce bateau est funéraire. Il était construit pour la cérémonie des funérailles du roi Den. Mais rien ne le confirme jusqu’à l’instant. En revanche, le bateau était indispensable dans le culte des Egyptiens, afin que le défunt puisse réaliser son voyage vers le monde de l’au-delà. C’est une embarcation symbolique de la mythologie égyptienne. Les Anciens Egyptiens imaginaient qu’en s’associant aux divinités solaires, lors de leur course perpétuelle au bord des barques sacrées, leurs âmes vivraient éternellement. C’est ainsi que le culte funéraire est fortement marqué par le mythe solaire. On préférait construire les tombeaux sur la rive occidentale du Nil où se couche le soleil, et lors de l’enterrement, le défunt traversait le fleuve dans des barques semblables à celle du dieu solaire. C’est ce qui explique la présence des bateaux dans des fosses auprès des pyramides des rois, à l’instar de la barque solaire du roi Khoufou (Chéops) de la IVe dynastie. Pourtant, les débris de la barque dégagée ont été révélés dans le cimetière thinite d’Abou-Rawach, situé à Guiza, dans la Moyenne-Egypte, bien que la tombe du roi Den soit à Abydos, à Oum Al-Gueab en Haute-Egypte. Cette découverte a alors soulevé plusieurs interrogations dans les milieux archéologiques, afin de savoir la raison de la présence d’une barque royale loin de la tombe de son propriétaire.

Actuellement, ces vestiges sont transférés au laboratoire du centre de la restauration du Grand Musée situé sur la route Le Caire-Fayoum. Ces planches seront soumises aux traitements les plus sophistiqués pour enfin être exposées dans la salle du Nil au Musée national de la civilisation égyptienne.

Doaa Elhami

El Ahram Hebdo (Août 2012)